Quand Fabio Cappello a décidé d'essayer Rio Ferdinand comme capitaine de l'équipe d'Angleterre, peu de supporters de United ont sourcillé tellement un tel choix semble évident vu l'exemple qu'il représente sur un terrain.


Calme et classe, Ferdinand est largement considéré comme un des meilleurs défenseurs de la planète. Il y a une grâce et une élégance naturelle dans tout ce qu'il fait, même si Rio confesse qu'il a travaillé comme un forcené pour renforcer ses failles.

Le consensus général parmi les fans est que cette saison est votre meilleure saison dans un maillot de Manchester United. Vous devez être satisfait de votre forme non ?
Eh bien, j'essaie toujours de tendre vers la régularité et je pense que sur les dernières saisons j'ai réussi à être assez régulier. Mais au final ce ne sont que les médailles et les titres qui comptent. Si je joue bien et que l'équipe gagne alors je suis content. Mais si nous ne gagnons pas alors ça ne compte pas si je joue bien. Peut-être que cet été je repenserai à cette saison et je pourrai me dire « Ouais, je suis content de ce que j'ai fait. » Mais jusqu'à ce moment là, je ne suis concentré que sur gagner des trophées.

Sur un plan personnel, y a-t-il une performance cette saison dont vous êtes particulièrement fier ?
Probablement le match à Rome. C'était un match difficile et un endroit délicat où jouer. Ils étaient l'équipe en forme en Italie à ce moment-là, ils jouaient un très bon football et rattrapaient l'Inter Milan en championnat. Ils ont commencé le match pleins de confiance, même sans Francesco Totti, mais on a réussi à repartir avec un avantage de 2-0. Collectivement, j'ai vraiment senti une maturité nouvelle dans l'équipe ce soir-là. Dans les saisons précédentes, on aurait certainement concédé un but ou deux dans ce genre de situation, mais on a tenu bon sans encaisser de but. Personnellement et collectivement, c'était probablement ma performance préférée de la saison.

Jouer en défense représente beaucoup de pression : une erreur peut être catastrophique. Comment faites-vous pour garder régulièrement un si haut niveau de concentration ?
Quand j'étais plus jeune j'avais énormément de difficultés à me concentrer pendant les 90 minutes. Je n'ai commencé à jouer en défense centrale qu'à un âge assez avancé, avant ça je jouais toujours en milieu, et le niveau de concentration et ce sur quoi on se concentre, c'est différent. Maintenant je me parle à moi-même et je me remémore ce que je dois faire. Ce sont les petites choses qui comptent, les choses comme faire en sorte d'être le premier à placer sa tête, et après ça, regarder constamment par dessus l'épaule pour savoir où tout le monde est. Ça m'a pris beaucoup d'années pour vraiment maitriser ça et savoir que je pouvais maintenir ma concentration pendant un match entier.

Qu'avez-vous amélioré d'autre à travers les années ?
J'ai appris qu'on doit faire des erreurs pour devenir un meilleur joueur. A West Ham, Harry Redknapp me disait toujours que pour faire de grands pas en avant, je devais faire quelques erreurs. J'en ai vraiment fait dans ma carrière et j'en ferai probablement encore quelques unes, mais le secret c'est d'être assez grand pour en apprendre des choses.

A West Ham souvent je perdais le ballon en relançant et ça nous coûtait un but. Un autre entraîneur aurait pu me virer mais Harry a maintenu sa confiance en moi et a continué à me retenir. Il me disait « Ecoute, choisis le bon moment pour faire ça. » Aller à Leeds était probablement la première fois de ma carrière où je devenais vraiment un défenseur plutôt qu'un joueur de ballon. Jouer là-bas a été un apprentissage extensif. La pression au club, à l'époque, était énorme. Leeds jouait la Champions League et on se battait aussi pour gagner le championnat. Cet environnement exige de ne pas faire d'erreurs.

Est-ce que la peur de faire des erreurs est un bon stimulant ? La dernière chose qu'on veut voir arriver c'est de se faire prendre devant 76000 personnes...
Ce n'est pas vraiment à propos du public. C'est au niveau de la fierté que ça fait mal. Tu ne veux pas être responsable de la défaite de ton équipe, quel que soit le nombre de personnes qui regardent. Je pourrais jouer un match du dimanche dans un parc et je détesterais autant quitter le terrain sachant que j'ai fait perdre mon équipe. Il n'y a pas de pire sentiment que sortir en se disant « Mon Dieu, je ne peux pas croire que j'ai fait ça. »

Quand Tomasz Kuszczak s'est fait expulser contre Portsmouth en FA Cup, vous êtes allé dans les buts. Quels sont vos souvenirs de ce jour-là ?
J'ai trouvé ça assez embarrassant pour être honnête ! Je suis assez critique à propos des gardiens. Je suis toujours à dire « Oh il aurait du sauver ça ! » ou « Comment il a pu encaisser celui là ? » Je pense qu'Edwin roule des yeux parfois à propos de moi en pensant « Mais qu'est-ce que tu connais des gardiens ? » Et il a raison évidemment ! J'ai compris moi-même ce que c'était contre Portsmouth.

Je suis toujours ennuyé d'avoir essayé d'arrêter le pénalty de la mauvaise main. Je pense que j'aurais pu l'avoir si j'avais étiré ma main gauche, mais mon instinct m'a dit de la jouer avec la droite. Je ne pense pas qu'on utilisera ce plongeon comme exemple dans les DVD de cours pour devenir gardien !

Wayne Rooney vous a dit un mot avant le pénalty, qu'a-t-il dit ?
Il m'a juste dit de choisir un côté et m'y tenir. Il m'a dit de ne pas attendre de voir de quel côté le tir allait être. C'était un bon conseil et j'ai eu de la chance parce que j'ai plongé du bon côté mais pas assez bien. Il n'y avait rien dans sa course ou dans son regard qui suggéraient qu'il allait tirer sur ma gauche. J'ai juste pensé à plonger de ce côté et si je la sortais, ben bien joué, sinon de toute façon personne ne s'attendait à ce que je la sauve.

Avez-vous apprécié votre moment dans les cages ?
Je ne serai jamais un gardien. Aucune chance. C'est la position la plus solitaire sur le terrain quand l'équipe attaque à l'autre bout. C'est vraiment, vraiment isolé. Tu es là tout seul avec toute cette herbe autour de toi et aucun autre joueur. Il y a juste le public derrière toi et les cages vides. C'était assez inquiétant en fait.

Vous avez souvent été capitaine cette saison. Est-ce que ça change la façon dont vous préparez un match ?
Non. Si tu changes ce que tu fais juste parce que tu es capitaine alors tu ne donnes pas le meilleur de toi-même. La façon dont tu te prépares pour un match ne doit pas être dictée par le fait que tu as ou non un petit bout de tissu en plus autour du bras. Tu y vas juste et tu fais ce que tu fais normalement. C'est ce qui te fait devenir capitaine à la base, alors pourquoi changer ?

Les matchs s'enchainent rapidement en cette fin de saison. Vous êtes fatigué ?
Non, je ne me sens pas fatigué du tout. J'ai eu quelques coups et bleus mais rien qui ne m'empêcherait de jouer. Quand on arrive à ce moment de la saison il faut être capable de se dépasser si on veut décrocher des titres.

La saison dernière vous avez souffert d'une blessure qui vous a écarté des demi-finales de la Champions League. Pensiez-vous que l'histoire allait se répéter quand vous êtes sorti contre Middlesbrough ?
Un peu. Quand je suis sorti, je me disais « Qu'est-ce qui se passe ? Ça ne peut pas se reproduire ! » Cette blessure s'est un peu guérie et j'ai pu jouer contre Rome et j'ai fini en ayant besoin qu'on me fasse des points de suture à l'autre pied ! On a du me faire des injections pour que je joue contre Arsenal mais à ce moment de la saison on est capable de jouer sur une jambe si ça signifie remporter un trophée. On a travaillé si dur toute la saison qu'on n'a pas du tout envie d'abandonner aussi facilement. Maintenant c'est le moment de se remonter les manches et de devenir un homme.

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